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Restrictions à la concurrence et entreprises du numérique - Projet de loi allemand

Le par Maître Andrine FEPEUSI, HEUSSEN Rechtsanwaltsgesellschaft mbH

L'économie sociale de marché doit être adaptée à la digitalisation. La dixième modification de la loi contre les restrictions à la concurrence vise à lutter plus efficacement contre l'abus de pouvoir de marché. Le 7 octobre 2019, le ministère fédéral allemand de l'économie et de la technologie (BMWi) a présenté le projet de loi de modification de la loi contre les restrictions de concurrence. Cette modification est motivée par la transposition de la directive UE 2019/1 visant à doter les autorités de concurrence des États membres des moyens de mettre en œuvre plus efficacement les règles de concurrence et à garantir le bon fonctionnement du marché intérieur. Ce projet de loi va toutefois au-delà. Il modernise la loi contre les restrictions à la concurrence (GWB) face aux défis des marchés du numérique et vise en particulier un droit de la concurrence adapté et proactif.

Outre la modernisation de la surveillance des abus en vertu des articles 18 et s. GWB, afin notamment de permettre un contrôle plus efficace des entreprises du numérique, le projet apporte des adaptations pour accélérer les procédures, par exemple en facilitant l'adoption de mesures provisoires par le Bundeskartellamt (Office fédéral de lutte contre les cartels).

Ci-après, les principales propositions de modification :

1- Surveillance des abus

Le projet de loi aborde de manière assez complète les défis actuels de l'économie numérique et celle des plateformes dans le domaine de la lutte contre les abus. Selon le nouvel article 19a du GWB, le Bundeskartellamt doit être en mesure d'établir qu'une entreprise est non seulement en position dominante sur certains marchés, mais a également une importance particulière pour la concurrence entre marchés en raison des effets de réseaux et d'accès aux données, des ressources et de son influence sur les activités commerciales des tiers. Le règlement vise donc les grands groupes du numérique tels que Google, Facebook et Amazon. Ce qui est nouveau, c'est l’« accès aux données importantes en matière de concurrence » comme critère d'appréciation supplémentaire pour déterminer une position dominante sur le marché. Cela tient compte de ce que l'on appelle le « pouvoir intermédiaire », c'est-à-dire la fonction d'intermédiaire et de contrôle des plateformes sur les marchés bilatéraux.

2- Contrôle des concentrations

En matière de contrôle des concentrations, le deuxième seuil de chiffre d'affaires sur le marché intérieur en application de l'article 35 al. 2, n° 2 du projet de GWB a été relevé de 5 à 10 millions d'euros. Le relèvement de ce seuil se justifie par l'allègement des petites et moyennes entreprises et par le fait que les autorités antitrust concentrent leurs activités sur les procédures complexes de concentration. La conséquence de ce relèvement de seuil est la suppression de la « clause de rattachement » ou de la « clause bagatelle » (jusqu’à présent article 35 al. 2, phrase 1 du GWB), qui exempte les fusions avec de petites entreprises (dont les chiffres d’affaires mondiaux sont inférieurs à 10 millions EUR) de l'obligation de notification bien qu'elles atteignent les seuils de chiffre d'affaires.

En outre, il sera plus facile pour les entreprises de calculer leur chiffre d'affaires sur la base des normes comptables internationalement reconnues qu'elles utiliseront à l'avenir, de sorte qu'il ne sera plus nécessaire de convertir le chiffre d'affaires.

3- Dommages et intérêts en matière d’entente

L'article 33a, al. 5 du projet de GWB prévoit une présomption réfragable concernant la participation des fournisseurs directs et des acquéreurs d'une entente dans les transactions juridiques avec les entreprises participant à l'entente. Cette présomption réfragable vise à faciliter la preuve de suspicion légitime de l'entente pour les demandeurs.

4- Coopérations horizontales

Afin d'accroître la sécurité juridique dans le domaine de la coopération entre entreprises dans le cadre d'accords de coopération horizontale, l'article 32c al. 3 du projet de GWB prévoit la possibilité d'une « lettre du président » comme exception au principe de l'auto-évaluation antitrust. En cas d'intérêt juridique et économique considérable, les entreprises pourront à l'avenir demander au Bundeskartellamt de décider dans un délai de six mois qu'il n'y a pas lieu d'agir.

5- Amende

Le projet de loi contient des règles concrètes concernant la fixation d'une amende. Le montant devrait être basé sur le chiffre d'affaires réalisé par une entreprise à la suite de l'infraction. Un certain comportement à la suite des faits, par exemple l'introduction de mesures de conformité efficaces, devrait permettre de réduire l'amende.

Pour le moment, il n’y pas encore d’informations claires sur l’adoption de ce projet de loi. Toutefois, l'application de cette 10e modification du GWB est prévue pour le second semestre de l’année 2020.

 

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